Il y a 69 ans, à Paris, depuis près de trois ans sous le joug de l’armée nazie avec le concours des forces de répression du régime pétainiste collaborant avec elle, les représentants de huit mouvements de Résistance, de six partis politiques résistants et des deux centrales syndicales clandestines se réunissaient le 27 mai 1943 autour de Jean Moulin, initiateur de la rencontre qu’il présida 48 rue du Four.
Coordonnant désormais dans le combat commun toutes les forces de la Résistance jusque-là dispersées, le Conseil National de la Résistance, créé à l’issue de cette réunion et présidé par Jean Moulin, allait ouvrir la voie à l’unification au sein des FFI des différentes structures militaires des mouvements de Résistance, à la mise en place des Comités locaux et départementaux de la Libération (CLL et CDL) et conduire à l’élaboration du Programme du Conseil National de la Résistance.
Ce fut aussi un événement de portée considérable pour l’avenir de la France : en se plaçant lors de sa réunion constitutive sous l’autorité du Comité National Français présidé par le Général de Gaulle, le CNR allait permettre à celui-ci de s’affirmer comme le représentant de l’ensemble de la France Combattante, tant sur le sol national occupé que sur tous les théâtres d’opération où s’illustraient aux côtés des Alliés les Français libres. Patriotisme, humanisme, idéaux démocratiques et aspiration à un monde juste et en paix furent les valeurs qui motivèrent l’engagement au péril – et souvent au sacrifice – de leur vie sur le sol national occupé des Résistantes et des Résistants dans le combat contre l’occupant nazi et le régime pétainiste complice de ses crimes, combat convergeant avec celui des Français Libres et prenant sa place dans la lutte des peuples et des forces alliées contre la barbarie génocidaire et liberticide.
Patriotisme, humanisme, idéaux démocratiques, aspiration à un monde juste et en paix inspirèrent, avec les valeurs de justice et de progrès social, le Programme du Conseil National de la Résistance, qui dessina les contours d’une France rénovée après sa libération, d’une France démocratique sur les plans politique, économique et social, d’une France solidaire. Programme, dont la mise en place à la Libération par le Gouvernement présidé par le général de Gaulle de nombre des mesures qu’il préconisait, permit de redresser économiquement la France, d’affirmer son indépendance nationale, d’approfondir sa vie démocratique en même temps que des avancées qui forment encore aujourd’hui le socle de notre protection sociale ; et ce malgré leurs remises en cause qui se sont accélérées et accentuées ces dernières années.
Soixante-sept ans après la victoire le 8 mai 1945 des peuples et des armées alliées sur la barbarie du nazisme et des fascismes, le monde contemporain connait hélas toujours la guerre, l’oppression, le racisme, les discriminations et épurations ethniques, les persécutions religieuses, le sous-développement social et culturel de populations entières. Les héritiers des idéologies criminelles vaincues en 1945 relèvent la tête à la faveur des crises que connaissent nos sociétés et le monde, et retrouvent une audience inquiétante, des formations néofascistes entrent dans des parlements voire des gouvernements européens ; dans notre pays même, la xénophobie contamine nombre de discours politiques, comme on a pu – hélas – le constater lors de la campagne présidentielle. Face à ces dérives et pour les contrer, les valeurs pour lesquelles luttèrent les Résistants et l’aspiration à un monde meilleur dont ils furent porteurs restent plus que jamais d’actualité.
C’est pour en assurer la nécessaire transmission aux jeunes générations, pour répondre à leur besoin de connaissance, de repères et de mémoire que notre Association Nationale des Anciens Combattants et Ami(e)s de la Résistance, l’ANACR, demande l’instauration au plus tôt d’une Journée Nationale de la Résistance le 27 mai, moment privilégié du passage de cette mémoire en même temps que d’hommage à la place de la Résistance dans l’histoire contemporaine de notre pays, aux Résistantes et Résistants tombés pour sa liberté.
L’ANACR a fait cette demande à tous les gouvernements et à toutes les majorités parlementaires qui se sont succédé précédemment, elle la présentera à nouveau à celui et celle issus des scrutins du printemps 2012. Avec le vif espoir que, par l’instauration de la Journée Nationale de la Résistance, soit enfin inscrite dans le calendrier mémoriel officiel de la Nation la reconnaissance du rôle de la Résistance dans la Libération de la France, dans la restauration de la liberté pour son peuple, et de la part qu’elle a prise dans la victoire finale contre le nazisme.
Louis Cortot, Président de l’A.N.A.C.R. Compagnon de la Libération
Pierre Martin, Président de l’A.N.A.C.R.