Persécutions anti-juives sous Vichy
En 1940, la communauté juive de Corse compte environ 600 membres. Son installation date [principalement] du 19e siècle. Il n’y a pas de tradition antisémite en Corse. Le PPF est la seule organisation qui soutienne les interprétations et actions des nazis contre les juifs. Son activité se limitera à des inscriptions hostiles sur les façades des commerces juifs en 1941. Mais la presse autorisée, qui soutient la collaboration, reproduit et approuve la politique antisémite de Vichy en 1941 et 1942 : le 18 octobre 1940, elle publie le 1er statut des juifs paru 15 jours auparavant et qui les exclut de la fonction publique.
Il en va de même, le 2 juin 1941, avec le deuxième statut qui leur interdit l’accès aux professions libérales et à l’enseignement supérieur. Quelques juifs étrangers réfugiés sont alors assignés à résidence.
En décembre 1941, sur ordre de la préfecture, commissariats et gendarmeries doivent procéder à un recensement systématique des juifs et les contraindre à faire apposer la mention « juif » sur leur carte d’identité. Chaque été, en 1941 et 1942, les milieux de la collaboration accusent les touristes juifs de venir dans l’île pour piller des ressources alimentaires déjà insuffisantes. Une accusation relayée par les radios italiennes qui émettent en Corse à certaines heures : ainsi une émission de radio Turin, le 27 avril 1942, dénonce une invasion de la Corse par « les rats hébraïques ». A partir de juillet 1942, tout juif qui change de résidence pour une durée supérieure à 30 jours doit en faire la déclaration à la gendarmerie ou au commissariat. Le mois suivant, le Bulletin diocésain du 24 août contient un article de Joseph Ferracci, membre du Conseil diocésain sur La mystérieuse destinée des juifs qui tend à justifier les persécutions exercées contre ce peuple qui n’a pas reconnu Jésus comme le Messie.
C’est une escalade qui se confirmera avec la présence militaire italienne l’année suivante.
Actions contre les juifs conduites par les Italiens
A son arrivée en mars 1943, le général Magli demande au préfet la liste des résidents israélites en Corse. Il demande s’il existe dans l’île un camp de concentration qui leur soit destiné. Sur ce point, la réponse est négative. Le 10 mai, à Bastia, 3 commerçants juifs sont interpellés par les Chemises noires, puis relâchés. Le 27 mai, toujours à Bastia, les juifs âgés de 18 à 60 ans et de sexe masculin, sont arrêtés . L’ordre vient du commandement italien. Il est exécuté par les autorités françaises. Transférés à Asco, ils y sont gardés par des militaires italiens. Au total, 57 personnes, toutes du nord de la Corse, sont internées à Asco. C’est seulement le 9 août, à Ajaccio, que 5 commerçants juifs sont arrêtés et incarcérés à la prison de la Citadelle. Ils ne subissent pas d’interrogatoires et sont relâchés le jour même avec obligation de demeurer en résidence forcée à Ajaccio. Quand l’insurrection du 9 septembre éclate, les internés d’Asco retrouvent tous la liberté.
Il y a donc eu en Corse une politique particulière qui tient à plusieurs facteurs : l’absence d’un projet clair de la part des Italiens, leur ferme détermination de ne pas laisser les Allemands empiéter sur un terrain qu’ils considèrent comme étant exclusivement de leur compétence, et aussi l’absence de sentiments antisémites aussi bien chez le préfet Balley [et les sous-préfets] que dans la population corse.
Hélène Chaubin dans le CD rom « La résistance en Corse ». Ed. A.E.R.I.
LIENS : « Heureux comme Juifs en Corse ? » – ANACR 2A (resistance-corse.asso.fr)
HEUREUX COMME UN JUIF EN CORSE ? – ANACR 2A (resistance-corse.asso.fr)