Né(e) à Cuttoli-Corticchiato (France, Corse du Sud(2A)), le 04 Octobre 1904 – Décédé(e) à Paris (France, Paris(75)), le 26 août 1944
Quand il rejoint Paris, en 1930, le jeune instituteur Jean-Dominique Ferrandi, qu’on appelle Jean-Mèmè, a déjà l’expérience du syndicalisme – il est adhérent à la CGTU – et de la politique, puisqu’il est membre depuis quelques années du Parti Communiste Français. Son activité intense n’échappe pas à la police française et à la Gestapo qui le traque. Sans succès. Il parviendra toujours à leur échapper. Ses camarades arrêtés lors d’une traque, et lui non, fera peser sur ses épaules un soupçon qu’il vivra mal. Disculpé, il reprend la lutte armée et meurt sur une barricade lors des combats libérateurs de Paris.
Jean-Dominique Ferrandi « Mèmè » est né le 4 octobre 1904 à Cuttoli-Corticchiato en Corse. Il est le fils de Barberine, née Burelli et de Jean-Antoine Ferrandi qui, gazé lors de la Grande guerre, en gardera des séquelles telles qu’il incombe, en partie à « Mémé », de pallier au handicap du père ; d’autant qu’il est l’aîné des huit enfants du couple.
Très bon élève, « Mèmè » fait des études secondaires, puis l’Ecole normale à Ajaccio où il habitait rue Fesch chez sa grand-mère, Pauline. A sa sortie de l’école normale des instituteurs d’Ajaccio, en 1922, il n’a que 18 ans. Il est nommé à Casamaccioli, dans le Niolu. C’est à cette époque qu’il adhère au Parti Communiste créé depuis peu en Corse. Il poursuit sa carrière au village de Peri où il exerce durant deux ans. En 1929, il épouse Marie – Toussainte Leccia dont il aura deux filles.
En 1930, il est muté à Paris. Il exerce dans le 13ème arrondissement, à l’école de la rue Damesme notamment. Il continue à militer au sein du Parti Communiste Français. où il nouera une solide amitié avec André Marty, qui en est un des plus hauts responsables. Il milite aussi au syndicat des enseignants de la C.G.T.U. En 1938, après le lâche accord de Munich, pressentant la menace nazie, il décide de faire revenir en Corse, son épouse et ses deux filles. En 1939, il est mobilisé à Ajaccio, Bastelica et Bonifacio où il apprend, en juin 1940, l’armistice signé par Pétain. « Face à la flotte italienne, les troupes refusent de mettre bas les armes. Jean -Mémé Ferrandi entre en contact avec les officiers de son unité pour organiser la continuation de la lutte. des tonnes de grenades sont cachées » (1)
A l’automne, il est obligé de regagner son poste à Paris, sous peine de révocation. Son épouse et ses deux filles l’y rejoignent fin 1941. Son activité politique et syndicale lui valent des contrôles policiers fréquents. « Jusque là, rédacteur et diffuseur du journal clandestin L’école laïque, dont il fut, dès avril 1941, l’un des animateurs courageux, Jean-Mèmè Ferrandi est chargé, avec d’autres, de la reconstitution du Syndicat National des Instituteurs qui lança un appel aux enseignants. Il écrit de nombreux tracts et articles pour les journaux de Résistants. » (2)
En octobre 1942, pendant qu’il fait classe, des policiers le cherchent à l’école de Damesme. Il s’enfuit par une porte du préau de l’école. Commence la clandestinité de celui qui sera « Jean-Paul ». Son épouse l’y rejoint ; alias : Andrée Rivière. Leur deux filles sont hébergées dans l’Indre, chacune dans une famille. Jean-Mèmè œuvre clandestinement à Paris, en banlieue parisienne et en Province. A la fin de l’automne 1943, Andrée Rivière qui travaillait au noir pour subvenir à leurs besoins, tombe gravement malade. Elle est hospitalisée sous un faux nom.
Au printemps 1944, ceux de la section du 14ème arrondissement, à laquelle il appartient sont arrêtés. Lui, arrivé quelques minutes en retard, échappe au coup de filet tendu par la police. Dès lors, le soupçon pèse sur lui : pourquoi lui seul en a réchappé ? Ayant perdu la confiance de ses camrades, il est mis en sommeil. Recherché par la police, renié par son parti et par les siens, pendant plusieurs mois il est sans domicile, sans moyens d’existence, vivant dans une grande solitude. C’est la misère morale et physique. Le hasard lui fait rencontrer un de ses amis avec lequel il peut enfin s’expliquer. Celui qui est à l’origine de l’arrestation de ses camarades du 14ème est identifié. Le cas de Jean-Mèmè est reconsidéré et il est réhabilité. Alors, Il se jette à nouveau dans l’action avec la rage du désespoir. On le voit accepter les missions les plus périlleuses. Après avoir assuré la liaison du Syndicat national des instituteurs avec la Fédération clandestine des fonctionnaires, Jean-Mèmè Ferrandi est, en mai 1944 affecté dans les rangs des partisans et Francs-Tireurs et Partisans Français (F.T.P.F.). Ainsi à la pointe du combat, il fut parmi les organisateurs d’une mémorable manifestation du 14 juillet à Paris. (3)
En août 1944, il fait partie du Comité parisien de Libération avec André Tollet, sous la direction d’Henri Rol Tanguy. Il en est membre, en qualité de Lieutenant d’état-major, de la commission générale « Transports et ravitaillement ». Il combat activement au sein du Bataillon Bara qui est en charge de la défense du quartier des Halles, principal lieu d’approvisionnement de la capitale. Il est aperçu pour la dernière fois dans le petit café de la rue Montmartre, à côté de la barricade dont il avait la garde (4) Le dernier jour de la libération de Paris, le 25 août, il est blessé. Il meurt le lendemain à l’hôpital de l’Hôtel Dieu, à proximité de Notre-Dame de Paris.
Antoine Poletti
(1) Maurice Choury. « Tous bandit d’honneur ». Ed. Piazzola sept. 2011. page 21
(2) ) Source : tract distribué lors de l’inauguration de l’école Jean-Mèmè Ferrandi à Peri, le 9 septembre 2007.
(3) Source : ibid. ci-dessus
(4) Source : Madeleine Jacob. « Franc-Tireur » du 14 octobre 1944.