Né à Venaco (France, Haute-Corse(2B), le 18 mars 1896 – Décédé à Paris (France, Paris(75), le 8 avril 1951
Paul Giacobbi, fils de Marius Giacobbi, est né le 18 mars 1896 à Venaco. Issu d’une famille de magistrats et de parlementaires corses, il fait ses études de droit à Paris. De retour en Corse, il est avocat à la cour d’appel de Bastia puis Maire de sa ville natale en 1922 – le plus jeune de France -, il a été élu sur la liste radicale-socialiste. Il est ensuite conseiller général puis sénateur de la Corse, en 1938. Il est l’un des hommes politiques les plus remarquables de sa génération aussi bien à l’échelon régional que national. Trois ans après, il devient conseiller général de Vezzani. Sa carrière parlementaire débute peu avant la guerre quand il est élu sénateur, le 23 octobre 1938, contre un adversaire de talent et d’expérience, Adolphe Landry, député républicain démocrate de la Corse depuis 1910 et sénateur depuis 1930.
Pendant la guerre
A 42 ans, Paul Giacobbi est le benjamin du Sénat. Présent à Vichy le 10 juillet 1940, il est le seul représentant de l’île ayant voté contre les pleins pouvoirs à Pétain, l’un des » Quatre-vingts « . Son refus d’adhérer au nouveau régime le prive de toute fonction publique jusqu’à la Libération et fait de lui un suspect. C’est en mai 1941 qu’il a un premier contact secret avec Fred Scamaroni, venu en Corse pour poser les jalons d’une organisation résistante, le réseau R2 Corse, rattaché aux FFL de Londres. Paul Giacobbi a aussi un contact avec la mission Pearl Harbour de De Saule constituée à Alger par Giraud. Les arrestations opérées par les Italiens désorganisent les réseaux en formation. Paul Giacobbi est arrêté le 19 février 1943 à Venaco et écroué à la caserne Marbeuf à Bastia, avant d’être interné le 26 à Prunelli di Fium’Orbu. Il s’y trouve toujours quand Fred Scamaroni est pris, le 17 mars, à Ajaccio. En juin, le bruit d’un transfert des internés de Prunelli en Italie décide Eugène Macchini et Paul Giacobbi à tenter une évasion. L’active complicité de la population qui les cache dans le village, puis les conduit dans la région montagneuse de Chisa où des abris précaires leur sont offerts (une bergerie, une grotte) leur permet d’échapper à la déportation en Italie – sort des autres internés demeurés à Prunelli, transférés fin juillet en Calabre, au camp de Ferramonti di Tarsia -. Après la guerre, Paul Giacobbi manifeste sa reconnaissance aux habitants de Chisa, en obtenant que leur village reçoive le statut de commune, indépendante de Ventiseri en décembre 1946.
La nouvelle de la signature de l’armistice par l’Italie est immédiatement suivie par l’insurrection des patriotes en Corse. Paul Giacobbi peut se rendre à Ajaccio où il rencontre le conseil de préfecture installé par le Front national (FN) et, le 14 septembre, le nouveau préfet désigné par Alger, Charles Luizet. Une nouvelle période de pleine activité politique, favorisée par De Gaulle, commence pour lui. Il est pour le Général, une opportunité d’élargir et de diversifier les composantes du comité départemental du Front national jusque-là de majorité communiste. On le voit accompagner De Gaulle dans sa traversée de la Corse du 6 au 8 octobre. La restauration d’une autorité d’État, préparée par Luizet et par le commissaire à l’Intérieur du Comité d’Alger, André Philip, est consacrée le 11 octobre 1943 par la création du comité départemental de Libération qui préfigurait, les CDL installés sur tout le territoire à partir d’août 1944. Aussi, par sa précocité, l’exemple corse est un modèle que le Comité d’Alger entend proposer comme une réussite et qui doit contribuer à sa légitimité. Paul Giacobbi sert cet objectif, il crée, le 22 octobre, le Mouvement IVe République, avec Henri Maillot, lié jusque là au Front national, mais non communiste. Quand une commission départementale remplace le conseil général, éliminé par Vichy, c’est Paul Giacobbi qui en devient le président. Il est aussi appelé avec Henri Maillot à siéger à l’Assemblée consultative d’Alger comme Arthur Giovoni, communiste, organisateur et dirigeant du Front national en Corse. L’importance qu’on lui reconnait à Alger, lui vaut d’accéder à des fonctions ministérielles quand le Comité se transforme en Gouvernement provisoire. Il y est nommé successivement ministre du Ravitaillement et de la Production industrielle, – poste des plus délicats en cette période de graves pénuries -, puis des Colonies. Il est élu président du conseil général de la Corse malgré la candidature de la mère de Fred Scamaroni, Charlotte, qu’il devance par 35 voix contre 23. Il devient député radical-socialiste de la Corse tandis qu’Arthur Giovoni est le seul représentant communiste élu à l ‘Assemblée. Si de Gaulle est convaincu de la nécessité du vote des femmes, le président de la commission de la réforme de l’Etat, Paul Giacobbi, en sa qualité de sénateur de la Corse, fidèle aux idées du radicalisme sur la question, tente de s’opposer à l’adoption du vote féminin.
Il présidera, jusqu’en 1949, l’inter-groupe RPF fondé en 1947. Son dernier poste gouvernemental est celui de ministre d’Etat chargé de la Fonction publique et de la Réforme administrative dans le cabinet Henri Queuille du 28 octobre 1949 au 4 juillet 1950.
Décédé prématurément le 8 avril 1951, Paul Giacobbi est une figure atypique. Il fait partie des rares élus locaux issus du radicalisme qui rejoignent le RPF, sous la IVème république, plus par fidélité personnelle à l’homme du 18 juin que par adhésion aux idées du rassemblement. « . Il était Chevalier de la Légion d’honneur, titulaire de la Croix de guerre et de la médaille de la résistance avec rosette.
Hélène Chaubin
Extrait du CD-Rom « La Résistance en Corse » AERI