Né(e) à Verdese (France, Haute-Corse(2B)), le 07 Janvier 1922 – Décédé(e) à (Autriche, ), le 31 déc. 1944
D’une famille originaire de Castagniccia, Simon Brando vit à Sospel qui est sous occupation italienne dès 1940. Une occupation qui prend une autre tournure quand celle des Allemands lui est substituée en 1943. Simon Brando est arrêté et déporté en Autriche. Il s’évade mais est vite repris et à nouveau envoyé en Autriche où après quelques mois on perd sa trace à la fin de l’année 1943, à la suite d’une seconde évasion. C’est, suivant la formulation de l’immédiat après-guerre, un « non-rentré» . (La date du décès ci-dessus n’est indiquée que pour satisfaire au besoin du questionnaire qui ne prend pas en compte les disparitions)
1/ Naissance, petite enfance à Verdese, (Canton d’Orezza. Haute corse)
Il naît le 7 janvier 1922 à Verdese, village de sa mère, Pomponi Marie-Dominique (fille de Pomponi Simon Brando, chaisier et de Quilghini Angeletta) qui a épousé en 1921 Marcelli Don Félix originaire de Campana, village proche de Verdese. Don Félix est le fils de Marcelli Antoine, muletier et de Campana Marie-Dominique.
Le père de Simon Brando- lequel a pris le prénom de son grand-père maternel- est ouvrier cultivateur, et sa mère, Marie-Dominique, sans profession -si ce n’est qu’elle fut un temps « vacataire » au service des pensions à Piedicroce- résident à Verdese où leur fils ainé, Simon Brando, passe sa petite enfance. La famille est de condition modeste et a du mal à vivre « au village » en ces temps difficiles de lendemains de guerre. Comme nombre de ses compatriotes, Don Félix aspire à une vie meilleure sur le continent et il s’engage dans l’armée à Bastia en 1928. Affecté dans un régiment d’infanterie alpine, il est destiné à la garnison à Sospel (dans l’arrière-pays niçois) où ses proches le rejoignent. Une branche de la famille maternelle de Simon Brando, en la personne de Sebastien Pomponi, son oncle, suit la même voie (l’armée pour Sébastien encore célibataire et le continent) et, illustrant le phénomène d’une émigration à attaches, il se retrouve également à Sospel durant l’entre-deux guerre. Les Marcelli-Pomponi y font souche et leurs descendants y entretiennent encore avec piété le tombeau familial alors que la proche ville de Nice devient progressivement leur ville d’accueil sur le continent.
2/ La jeunesse de Simon Brando à Sospel
Elle est marquée, à l’âge de 15 ans par le décès de son père, le sergent-chef Don Félix Marcelli, qui est victime d’une chute de cheval lors d’une reconnaissance sur les hauteurs de Sospel, à la frontière italienne, le 12 avril 1937. Après un séjour au Val de Grâce, il décède le 23 juillet des suites de ses blessures. Simon Brando, ainé de six enfants (trois sœurs et deux frères), devient soutien de famille. Ils vivent dans le besoin et doivent, après la mort du père, quitter leur appartement confortable pour un modeste logis dans le vieux Sospel. Le jeune adolescent travaille comme manœuvre, mais ce n’est pas suffisant pour « nourrir » sa famille en complément de la modique pension militaire que perçoit sa mère. Comme son père et son oncle, il s’engage à 19 ans, en mars 1941, alors que la guerre sévit depuis deux ans. Il est affecté au 25ème B.C.A. (Bataillon des chasseurs alpins) à Hyères puis il obtient, en qualité de soutien de famille, son rapprochement à Sospel. Ayant ainsi fait partie de « l’armée de l’armistice » mais sans connaître « le feu » des armes, il est rendu à la vie civile en septembre 1942, sans avoir pu envisager de « faire carrière » dans une armée « démobilisée » au temps de Pétain. La vie à Sospel est relativement paisible malgré l’occupation italienne dans une localité où résident de nombreuses familles d’origine transalpine.
3/ 1943, l’année tournant.
L’atmosphère s’alourdit dans les Alpes Maritimes au début de cette année 1943 quand la garnison italienne est brutalement remplacée par les troupes de la Wehrmacht. L’inquiétude grandit parmi la population : bruits de bottes, d’engins mécanisés, tirs le soir pour imposer le couvre-feu. Face aux groupes de maquisards qui s’organisent, la répression allemande est violente (tortures et exécutions de jeunes sospellois).
Le 10 juin de cette année, Simon Brando, en compagnie de deux ou trois amis, prend le train pour Nice. Il est arrêté à son arrivée à la gare Saint-Roch par des soldats allemands et remis à la milice française. Selon le témoignage de son frère Adolphe, alors âgé de 13 ans, ils doivent signer un document ( pour le S.T.O. ?) et, à l’issue de cette véritable rafle, ils sont embarqués dans un train à destination de l’Allemagne. Simon Brando ne reverra plus sa famille. Les lettres retrouvées chez sa mère permettent de suivre ses déplacements :
– Arrivée à Graz en Autriche le 29 juin 1943, via Dijon, Mulhouse, Munich puis Vienne le 16 juillet 1943.
-Séjour, sans doute au camp de Kaffenberg (usine de fabrication de moteurs d’avions) puis à nouveau Graz d’où il s’évade en août 1943 « …sur le toit du wagon d’un train de permissionnaires pour la France ».
-Il est repris le 6 août 1943 à Belfort par deux policiers français qui le remettent aux Allemands.
-Depuis Belfort il est expédié à Coblenz le 8 août 1943 et emprisonné dans un camp disciplinaire
-Il retrouve « ses copains » à Marentz en Autriche, un mois plus tard, le 29 septembre 1943. Sa dernière lettre à sa mère, datée du 9 décembre 1943, fait part de son espoir d’être de retour parmi les siens à Noël. Puis, plus rien ; même la Gestapo semble le rechercher, qui se présente au domicile de sa mère le 12 avril 1944. C’est qu’entre temps (fin décembre 1943 ?) il s’est à nouveau évadé, mais les témoignages recueillis auprès de ses compagnons au lendemain de la guerre ne permettent pas de dire dans quelles conditions. Relevons pourtant cette déclaration de l’un d’entre eux suivant laquelle « il aurait quitté le lager* avec l‘intention de retourner en France ou bien de passer en Yougoslavie » pour rejoindre, comme son compatriote Bonafedi, les partisans de Tito. C’est une piste encore ouverte que ses proches parents se proposent d’explorer.
4/ Reconnaissance posthume
Par jugement du 28 novembre 1958, à la suite de longues démarches faites par son oncle, Sebastien Pomponi, alors gendarme à Grasse où cette branche de la famille maternelle s’est fixée, fut mis un terme à ce statut quelque peu humiliant de « non rentré » appliqué aux prisonniers de guerre disparus et Simon Brando Marcelli fut officiellement reconnu comme « mort pour la France » et porté comme tel sur le registre d’état-civil de Sospel. L’année suivante, une plaque commémorative lui fut dédiée dans son village natal de Verdese. Plus de soixante-dix ans nous séparent de cette tragique disparition et les siens n’en ont toujours pas fait le deuil .L’hommage rendu par le maire de son village natal de Verdese (u suo cuginu carnalu), en ce 8 mai 2015, y fut particulièrement émouvant.
Alain PIRCHI et Francis POMPONI
La dernière lettre de Simon Brando à sa mère Düsseldorf (?)* le 29 novembre 1943, Je viens de recevoir à l'instant ta lettre chérie que j'attendais avec impatience car, chère maman, moi aussi j'ai souffert de ne pas avoir de vos chères nouvelles. Enfin, j'ai votre lettre. J'en ai pleuré mais je suis heureux de vous savoir en bonne santé et que tu te débrouilles très bien. Je souhaite que ça continue. Moi, ici, la vie est toujours la même. Je me suis un peu rattrapé et la santé est assez bonne : (ILLISIBLE) nous avons à peu près tous les jours. (...) Je me mettrai sérieusement au travail et je passerai ma vie auprès de toi, rien que pour te soigner et te dorloter comme un enfant. Ici, qu'est-ce que tu veux, je ne peux pas t'envoyer de l'argent. Je ne travaille pas souvent car il y a de la neige et il fait beaucoup froid ; et de l'argent, on en gagne guère. Mais ne t'en fais pas, bientôt je retournerai et alors la vie changera. Je me tuerai au travail mais je veux te savoir heureuse, car la vie militaire c'est le paradis à côté de celle d'ici. Je me rappelle qu'à l'armée je t'écrivais que je changerai mais je ne l'ai pas fait car je n'étais qu'un imbécile mais maintenant j'ai compris la vie, et que trop de souci je t'ai fait faire ; et cela je me le pardonnerai jamais. Mais c'est fini. Que tout rentre dans l'ordre et vous aurez un père de famille parfait. Simon Brando MARCELLI * Le lieu Düsseldorf est incertain parce que pas très lisible. Des pages de la lettre manquent. Les extraits de la lettre publiés sont contenus dans les seules pages 1 et 3.