Hommage à tous les combattants de 1940
Depuis juin 1940, du fait que le sort des armes a été funeste à la France, les combats d’alors laissent planer une certaine gêne liée à la plus grande défaite de nos armées. Défaite certes, mais néanmoins courageuse car la plupart des soldats se sont généralement battus, souvent avec bravoure, avant de succomber devant la puissance mécanique de l’adversaire. La campagne de mai et juin 1940 a été très courte pour tous ceux qui, restés aux reflexes de 1914-18, pensaient avoir la meilleure armée du monde. Les responsables politiques, militaires et administratifs de l’effondrement des armées françaises, pris au dépourvu, tenteront alors de discréditer les combattants pour ne pas perdre la face. A quatre-vingts années de distance, il est temps de rendre leur dignité à ceux qui ont lutté de leur mieux, avec ce qu’ils avaient, et de rappeler leurs sacrifices. Sacrifices éclipsés par les éclatantes victoires ultérieures de l’armée française renaissante, depuis l’appel du général de GAULLE le 18 juin 1940, et surtout lors des campagnes aux cotés des Alliés en Afrique et en Italie, puis lors des débarquements de Normandie et de Provence, suivis par la libération de la France et par la capitulation de l’Allemagne le 8 mai 1945.
La Corse ne veut pas oublier
Lors de ce que l’on appellera plus tard la « Bataille de France », ce sont près de 1 845 000 Français qui sont emprisonnés en Allemagne ; parmi eux, quelque 2 200 prisonniers militaires insulaires. Ce sont aussi près de 100 000 soldats français qui seront tués entre septembre 1939 et juin 1940, en tentant de défendre leur pays contre les troupes allemandes. La Corse en dénombre environ 460 dont 272, soit près de 60%, appartenaient à la 173° Demi-brigade alpine. Tous ces combattants, qu’ils soient de carrière, mobilisés en septembre 1939 ou jeunes recrues effectuant leur service militaire obligatoire, ont leurs noms sur les monuments aux morts des communes, et sont donc inclus dans toutes les commémorations du 8 mai et du 11 novembre. Peut-être ne les honore-t-on pas assez.
Aujourd’hui, il convient de souligner le mérite de l’Amicale des anciens du 173ème et 373ème RI (les deux régiments chers à la Corse), présidée par le commandant (h) François ANTONETTI et secondé par l’infatigable Paul STUART. Cette amicale, après avoir entièrement restauré en 2002 son Mémorial national à Esnes-en-Argonne près de Verdun, vient encore de se hisser sur le podium ces deux dernières années. C’est ainsi qu’en septembre 2018, elle s’est rendue pendant trois jours dans l’Aisne et l’Oise, sur les lieux mêmes où le 173° RI s’est victorieusement battu en octobre 1918, se faisant remettre la Croix de guerre et épingler une quatrième palme sur la cravate de son drapeau. En partenariat avec les municipalités locales particulièrement honorées par le projet, quatre plaques commémoratives ont été apposées dans une liesse et un enthousiasme très médiatisés par la presse écrite, parlée et télévisuelle des Hauts-de-France. Outre les inoubliables cérémonies officielles, on retiendra qu’une chorale villageoise a effectué, spécialement et en toute discrétion, un déplacement en Corse pour apprendre à chanter le « Dio vi salvi Régina » qu’elle a restitué lors d’une grande messe, à la grande surprise de la délégation Corse.
Cette année, dans le cadre du 80° anniversaire des combats de 1940, un nouveau déplacement avait été organisé pour le mois de juin 2020, dans trois autres localités du sud de l’Aisne. C’est très exactement à Maizy, Concevreux et Roucy, que la 173° Demi-brigade Alpine (173°DBA) s’était illustrée les 9 et 10 juin 1940, accrochant une nouvelle palme au drapeau, mais laissant aussi 272 des siens sur le champ de bataille. Hélas, la pandémie liée au Corona virus, avec tout ce qui en découle, en a décidé autrement. Ce ne sera que partie remise car, en accord avec les municipalités passionnées par le projet, un report a été acté pour l’année prochaine. Aujourd’hui, en ce mois de juin 2020, si le Coronavirus n’induit plus le confinement, les souvenirs du passé sont fort heureusement restés libres, sans contraintes de circulation et méritent d’être évoqués.
Lieutenant-colonel (h) Raoul PIOLI,
membre de l’Amicale des anciens du 173ème et 373ème R.I.