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BiographiesEvénements Colonna d’Istria Paulin

18 mars 2023

Né le 27/07/1905 à Petreto-Bicchisano (Corse du Sud) et décédé le 4/06/1982 à Toulon (Var)
Paulin Colonna d’Istria est un militaire français et résistant, qui a essentiellement effectué son activité dans la gendarmerie, et a combattu sur plusieurs théâtres d’opération (guerre du Rif en 1926, résistance en Corse, 2ème DB de Londres à Paris). Pour ces faits glorieux, il a été nommé Compagnon de la Libération, notamment pour son rôle important dans la libération de la Corse en 1943.

La jeunesse militaire

Il est né le 27 juillet 1905 dans la maison de ses parents, dans une petite commune rurale forestière de 1.600 habitants, à Petreto-Bicchisano, proche d’Ajaccio.Il n’y demeurera pas longtemps.Paul (Paulin) est le fils d’Antoine Colonna d’Istria et Jéromine Tiramorsi. Comme son père, gendarme, il s’oriente très jeune, vers le métier militaire. Il entre à l’école militaire d’enfants de troupe, St Hippolyte du fort (Gard), puis au collège d’Autun (Saône et Loire).
A 18 ans, Il s’engage, le 7 août 1923, au 23ème régiment de tirailleurs algériens et en sort sergent en 1924. Affecté au 3ème régiment de tirailleurs algériens, Il participe au Maroc à la campagne du Rif, jusqu’en 1926. En 1927, il est admis à l’école militaire des sous-officiers d’infanterie et de chars de Saint Maixent et termine sous-lieutenant en 1929. Dès lors, Il se spécialise, et entre à l’école de gendarmerie de Versailles où il devient lieutenant. Après avoir gravi tous les échelons, de la 2ème classe à officier, il est affecté à la brigade républicaine mobile en métropole durant 3 ans. Chargé du maintien de l’ordre, Il est blessé lors d’une manifestation de grévistes à Pont de l’Arche (Eure). Promu capitaine, Il est affecté, en 1936, à nouveau en Afrique du Nord.

Les deux premières années de guerre en service commandé à Alger

Il se trouve en Algérie au moment de la déclaration de guerre de la France et de l’Angleterre, le 3 septembre 1939. Il a 34 ans. Ayant entendu l’appel du général de Gaulle du 18 juin 40, il entre en résistance passive et discrète.  Quand les Alliés débarquement en AFN, le 8 novembre, il est en poste en Algérie en tant que capitaine, adjoint au général Mourot, commandant la gendarmerie. Il est impatient d’agir. Une première opportunité lui est proposée par un de ses cousins, Antoine Colonna d’Istria ; ce serait pour une mission : la mission Frederick organisée par les Anglais. Elle sera débarquée en Corse le 11 février 1943. Mais Cesari n’a pas pu y participer, cloué au lit par une dysenterie.

Une seconde opportunité se présente. Son ami Sansonetti, avocat à la cour d’appel d’Alger, lui dépêche un de ses compagnons du 8 novembre1patriotes organisés en groupes se sont mobilisés pour faciliter le débarquement des Alliés (américains, et britanniques sous uniforme américain) le lieutenant L’Hostis, chargé de trouver un risque-tout pour la Corse.  Le général Giraud, nommé commandant en chef français civil et militaire, le met à la disposition de la Sécurité militaire pour, en accord avec les services alliés, commander la seconde phase de la mission Pearl Harbour, plus orientée que la première vers l’armement et la structuration militaire de la Résistance. Il va remplacer le commandant de Saule, chef de la première phase de la mission qui avait pour tâche la collecte de renseignement et d’organisation de réseaux de résistance en Corse, ceci en vue d’un débarquement des troupes militaires françaises. Avant de partir d’Alger, il est « briefé » sur la situation de l’Ile par deux des quatre premiers agents de cette mission Pearl Harbour revenus de Corse le 17 mars. Ces résistants, Toussaint Griffi et Laurent Préziosi repérés par l’ennemi ; ils ont eu ordre de rentrer à Alger, le 10 mars, par le sous-marin Casabianca.
De retour à Alger, les deux agents revenus de Corse informent les Alliés des résultats de leur mission : coordination politique des réseaux, livraison d’armes par le sous-marin Casabianca, informations sur les implantations de l’ennemi, etc.  Ils rencontrent Colonna d’Istria dans le bureau du Colonel de Villeneuve, chef de service du 2e bureau, rue Charras, à Alger. Afin de lui fournir tous les éléments nécessaires à la poursuite de la mission, notamment de la nécessité de développer la coopération avec le Front National, la seule structure capable de coordonner l’ensemble de la résistance corse.

La mission de coordination militaire préalable de la résistance en Corse

Dans la nuit du 3 au 4 avril 1943, un sous-marin britannique, Le Trident, débarque Paul Colonna d’Istria (alias Cesari) clandestinement et Jean-Baptiste Acquaviva, sur la côte orientale à l’embouchure du Travo, près de Solaro. Plusieurs résistants corses le réceptionnent pour protéger son arrivée, notamment le radio Pierre Griffi, – seul resté en Corse du premier débarquement – l’ingénieur Roger Doudon, François Carli, et Milelli de Venaco. Césari rejoint rapidement la région sauvage du Niolo et s’installe dans une bergerie à Corscia où il établit son poste de commandement provisoire. Il constate les jours suivants, le régime de terreur qui y règne et qui a réussi à désorganiser les mouvements de résistance, dont le réseau R2 Corse, celui de Fred Scamaroni.

Il prévient Alger de ce drame. Ordre lui est alors donné de tenter de regrouper militairement les réseaux de résistance et de les réorganiser en un seul mouvement pour être prêt au combat libérateur. Il constate aussi par lui-même que le Front National est le seul survivant d’une tragique répression. Lui aussi, à son tour, sera repéré et recherché par l’OVRA. Par l’intermédiaire de membres de ce mouvement, il entre en contact direct avec le Comité Départemental du Front National dans lequel il est coopté, à la suite d’un remaniement où Maurice Choury prend la place de Nonce Benielli sur Ajaccio, lequel prend en charge l’arrondissement de Corte.
Depuis que la mission a pris pied en Corse à la mi-décembre, elle travaille en étroite collaboration avec le Front National et fait office de liaison avec les autorités d’Alger. La double appartenance au F.N. et Pearl Harbour est possible et effective parfois.

Avec l’arrivée de Paul Colonna d’Istria, outre la mission de renseignement, Pearl Harbour va poursuivre l’unification de la Résistance et son armement pour en faire une force supplétive quand les Alliés débarqueront. Sa connaissance du métier des armes et son savoir-faire politique font du commandant Colonna l’homme idoine pour cette nouvelle phase de la mission. Suite au changement d’agents, la mission Pearl Harbour est totalement intégrée dans cette organisation pour faire office de liaison avec les autorités d’Alger depuis l’arrivée en Corse de la première équipe, le 14 décembre 1942. Colonna devient un des éléments de la synthèse du mouvement. Sans imposer d’orientation politique, Il coordonne militairement les actions, notamment la réception des armes dont le FN a la responsabilité en déléguant, par exemple, la reconnaissance des embouchures du Golu et du Travu à Joseph Pancrazi, ceci afin de préparer une nouvelle venue d’un sous-marin. Il décentralise le mouvement par village, avec un cloisonnement strict. Il multiplie les moyens de liaison par la répartition géographique des agents de liaison et par la généralisation de l’utilisation des noms d’emprunt. Sa responsabilité au sein du comité directeur du F.N. rassure les éléments à priori hostiles à ce mouvement. Il permet de nouvelles recrues.

L’organisation des livraisons d’armes.

Lorsque les livraisons d’armes ne peuvent s’effectuer rapidement par sous-marin, Colonna sollicite Alger pour des parachutages. Le 9 juin 1943. Colonna avec son groupe constitué à cet effet (Jean Nicoli, Jules Mondoloni, Bébé Arrighi, Dominique Vincetti, Dominique Lucchini dit Ribeddu), se rend pour prendre une livraison d’armes à l’embouchure du Travo,  à Solaro. Le HMS Sybil dépose avec un canot les armes et Colonna y monte pour discuter avec le Commandant mais les tirs soudains d’un poste italien l’obligent à y rester et repartir à Alger. Le groupe de résistants qui l’accompagnait se replie, revient récupérer les armes déposées, les stocke sur 3 dépôts, puis Ribeddu les répartit sur la région de Serra di Scopamene avec une équipe de muletiers, après avoir neutralisé trois carabiniers qui l’avaient surpris. Après la fusillade de la Brasserie nouvelle, Giraud convainc Alger de multiplier les livraisons d’armes. Sur les plages de Corse, le sous-marin Casabianca en livrera 70 tonnes. Les plus importantes livraisons ont lieu sur la plage de Saleccia. Dominique Vincetti qui est à la réception y trouvera la mort dans une fusillade face aux costieri italiens. Colonna y est souvent présent mais pour en accélérer la cadence, il obtient que les livraisons le soient aussi par voie aérienne, c’est-à-dire par des parachutages (le premier aura lieu le 4 mai).

La lutte préparatoire au soulèvement et la mission de gestion militaire des combats.

Depuis le 25 juillet 1943, Mussolini a été destitué. Cet événement devrait être suivi d’une proche capitulation. Alors faut-il en appeler aux Italiens pour qu’ils épaulent la Résistance quand le moment sera venu de combattre les Allemands ? Oui décide à la majorité – dont Colonna – le Comité départemental du F.N. réuni le 26 août. Si le général Giraud a armé la résistance corse, c’est en vue d’en faire une force supplétive après un débarquement allié. Or, la volonté du Comité départemental du F.N. c’est de ne pas attendre ce débarquement et de déclencher une insurrection aussitôt actée la défaite de l’Italie. Le F.N. est passé de 2.000, fin 1942, à 12 000 volontaires en septembre 43. À partir du 8 septembre, date officielle de l’armistice entre Italiens et Anglo-Américains, Colonna sait qu’il ne pourra pas contenir les résistants alors même que le corps expéditionnaire primitivement destiné à la Corse a été engagé sur l’Italie. Pour rééquilibrer le rapport de force militaire, Il prend contact ce jour-là avec le Général Magli, commandant le VII ème corps d’armée italienne, pour exiger de lui une prise de position sans équivoque contre les troupes allemandes. Malgré sa promesse, ses soldats laissent la voie libre aux Allemands pour leur repli vers l’Italie.

Le 9 septembre, l’appel à l’insurrection. les renforts d’Alger.

Ajaccio est libre le 9 septembre. L’appel lancé à Ajaccio par le Comité départemental du F.N. est suivi par le remplacement du préfet par un conseil de préfecture. Choury, seul dirigeant présent à Ajaccio est mandaté par tous les dirigeants dont Cesari. Ce dernier est présent à Bastia où les Allemands veulent se rendre maître du port à la place des Italiens. Ils y parviendront après de durs combats à terre et en mer. (Cf. La libération de Bastia). Le 14 septembre, arrive à Ajaccio le renfort annoncé, soit le complément du bataillon de choc de 500 hommes avec Charles Luizet le nouveau préfet, désigné par le CFLN  pour occuper le poste de préfet; le général Mollard nommé gouverneur militaire de la Corse, le colonel Deleuze, chef d’état-major du 1er corps d’armée et Arthur Giovoni représentant le Front National qui était parti par sous-marin à Alger pour rencontrer les autorités d’Alger. A Ajaccio, tête de pont, règne une activité intense. 4700 hommes débarquent sur la période du 17 au 28 septembre.

Le 21 septembre, Giraud atterrit à l’aéroport d’Ajaccio. Il se rend à la clinique où Colonna, malade, hospitalisé, reçoit la légion d’honneur. Puis le général se rend à Corte où le général Magli accepte de mettre à disposition son artillerie mais son comportement, tout de duplicité, sèmera le désarroi parmi ses troupes et permettra aux Allemands d’évacuer la Corse à moindre frais.Du 21 septembre à la libération totale de l’ile, le 4 octobre, les combats font rage. Bastia, principal lieu d’évacuation des Allemands, en subira les plus graves dommages : des pertes humaines parmi les civils (170 morts environ) et la ville sinistrée par les bombardements.

Qui pour représenter l’État en Corse ? Les dirigeants du F.N. entend y être associée mais pour le préfet Luizet cette autorité ne se partage pas. Alors nait un litige politique entre les membres du Front National et les envoyés du CFLN dirigé par de Gaulle. Colonna aide, pour sa part, le général Martin à récupérer les armes détenues par les patriotes. Il fait le tour des villages avec Dominique Salini du Comité de la ville de Bastia, en y expliquant notamment qu’elles pourraient servir à d’autres maquis français. Les armes sont rendues, notamment sur la place St Nicolas lors de la venue du Général de Gaulle, le 7 octobre 1943.

La poursuite de son combat dans la 2ème guerre mondiale

Colonna quitte la Corse, après les cérémonies du 30 novembre 1943. En décembre 1943, Colonna d’Istria est détaché au commandement des Forces françaises en Grande-Bretagne. Il est nommé Compagnon de la Libération par le Général de Gaulle. Il entre le 25 août 1944 danParis libéré avec la 2e DB du général Leclerc qui a débarqué le 1er août en Normandie, à Utah-Beach, intégrée à l’armée américaine du général Patton. De ce fait, Il est promu sous-directeur de la gendarmerie à Paris.

Après la guerre, la consécration de sa carrière militaire dans la gendarmerie

Alors lieutenant-colonel, il poursuit ses fonctions de gendarme. Promu colonel de gendarmerie en 1947, il est à la tête de la garde républicaine mobile à Alger, puis est nommé à Lyon au commandement régional de la Gendarmerie. En 1951, il est incité à se présenter aux élections législatives. Élu député d’Alger en second sur la liste gaulliste (union des indépendants et RPF), il démissionne rapidement de son mandat, peu enclin à une carrière politique. En 1952, il doit affronter une douloureuse épreuve. L’aîné de ses fils, pilote de chasse, major de sa promotion à l’école de l’Air, meurt en Indochine après avoir, encore adolescent, rejoint la résistance contre l’Allemagne. En 1956, il est nommé général de brigade, et prend le commandement de la Gendarmerie des forces françaises en Allemagne. Tout de suite après-guerre, il s’est fait historien de la résistance et la libération de la Corse où il s’est révélé aussi grand stratège militaire que fin politique.

Sa carrière active prend fin en 1963. Décédé à Toulon le 4 juin 1982 à l’âge de 77 ans, il est inhumé à Marseille. Plusieurs rues et stèles portent son nom en Corse (Ajaccio, Porto-Vecchio, Petreto-Bichisano). Son nom est aussi attribué à la 116e promotion de la prestigieuse École des Officiers de la gendarmerie (EOGN) en 2011.

Georges Preziosi.

Décorations :

  • Grand officier de la Légion d’honneur
  • Compagnon de la Libération- décret du 16 août 1944
  • Croix de guerre 1939-1945 (2 citations)
  • Médaille coloniale (agrafe « Maroc » )
  • Croix des services militaires volontaires 3ème classe
  • Médaille d’or de l’éducation physique et des sports
  • Médaille de la Paix du Maroc(Espagne)
  • Distinguished Service Order(Royaume-Uni)

Sources documentaires :
CV militaire de Paul colonna d’Istria.
Conférence de Paul Colonna d’Istria, en février 47 à la Fédération des groupements corses de l’AFN.
Tous bandits d’honneur. Maurice Choury. Ed. Piazzola.
Dominique Salini.

LIEN : Paulin Colonna d’Istria : Résistance et libération de la Corse 

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