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ActualitésArchives : éditoriaux Il y a 79 ans, la première réunion du CNR

28 mai 2022
Cérémonie 27 mai 2022
Cérémonie à Ajaccio du 79ème anniversaire de la 1ère réunion du C.N.R.

Cérémonie à Ajaccio pour commémorer le 79ème anniversaire de la première réunion du Conseil National de la Résistance. Sont tour à tour intervenus : Carla Maria Susini-Sirop, classe de 3ème du lycée Laetitia pour la lecture d’un extrait du discours du général de Gaulle prononcé à Oxford en novembre 1941, puis Antoine Poletti, membre du bureau de l’ ANACR 2A (Voir ci-après) et Mr Pierre Larrey, secrétaire général de la préfecture pour la lecture du message du gouvernement.

« Dans la France occupée par l’ennemi nazi et fasciste, le 27 mai 1943, rue du Four à Paris, se réunissait pour la première fois, le Conseil National de la Résistance. Jean Moulin, l’envoyé du général de Gaulle, peu avant son martyre, voyait ainsi couronné un long et laborieux processus d’unification de la quasi-totalité des mouvements, partis et syndicats qui œuvraient dans la clandestinité. De ce jour, la résistance de chacun d’eux n’en faisait plus qu’une : « La Résistance ».

Face au péril, ils avaient su surmonter leurs désaccords, leurs divergences – profondes parfois – afin de relever le défi auquel la France était confrontée. La collaboration du régime de Vichy avec l’ennemi l’avait déshonorée et déconsidérée. La guerre finie, la France courrait le risque de figurer parmi les vaincus et d’être placée sous la tutelle des Alliés. Pire : elle pourrait se voir amputée d’une partie de son territoire. Empêcher ce scenario, voilà le défi que devait relever les patriotes !

Certes, le général de Gaulle avait, depuis son célèbre appel du 18 juin, reconstitué, hors de France, et non sans peine, les Forces Françaises Libres, une armée pour maintenir la France au combat aux côtés des Alliés. Mais il lui fallait aussi, pour affirmer sa légitimité auprès d’eux, rassembler en une seule toutes les Résistances luttant dans le pays et les mettre à l’unisson avec la Résistance extérieure qu’il incarnait à Londres. Ce fut chose faite ce 27 mai 1943. « La voix de cette France écrasée, mais grondante et assurée, couvrait soudain le chuchotement des intrigues et les palabres des combinaisons. J’en fus à l’instant plus fort » écrira-t-il plus tard.

Dans l’immédiat, le Conseil National de la Résistance avait la charge de coordonner les efforts politiques et militaires afin de contribuer, avec les Alliés, à la libération du pays et d’en hâter l’avènement. Mais dès ce printemps 1943, le Conseil National de la Résistance avait aussi esquissé ce qui deviendra, un an plus tard, un programme de profondes réformes économiques, sociales et politiques qui constitueront le socle sur lequel, dans des relations internationales rénovées, la France se reconstruirait après-guerre. Une France solidaire, fraternelle et souveraine, pour « Faire en sorte, est-il écrit dans le programme, « que l’intérêt particulier soit toujours contraint de céder à l’intérêt général, que les grandes sources de la richesse commune soient exploitées et dirigées non point au profit de quelques-uns mais pour l’avantage de tous, que les coalitions d’intérêt […] soient abolies une fois pour toutes ». (Fin de citation)

lecture d'un discours du Gl de Gaulle
Lecture d’un discours du Gl par une élève du collège Laetitia

Qu’en est-il aujourd’hui, presque huit décennies plus tard ? Ce monde qui est le nôtre n’est pas à la hauteur des sacrifices et des espoirs de la Résistance. La misère, la faim, les inégalités, le fanatisme religieux, les conflits ethniques, les guerres sévissent partout dans le monde – à nos portes même.
Ces fléaux sèment la mort et la détresse. Ils contraignent, chaque année des millions d’hommes, de femmes et d’enfants à fuir la terre où ils vivaient pour essayer de trouver refuge ailleurs, parfois loin de leur pays, voire de leur continent. Et se pose aujourd’hui, avec toujours plus d’acuité, le problème de l’usage immodéré que l’homme fait des ressources de la planète. Alors que celle-ci est déjà bien abîmée, nous continuons d’avancer les yeux bandés.

Aujourd’hui, l’Europe – mais pas seulement elle -, l’Europe est en proie aux nationalismes vindicatifs, violents et guerriers, aux recherches stériles de valeurs propres, à la peur de l’autre et au repli sur ce qu’il croit être son noyau de vérité. L’universalisme qui a fait la grandeur de notre continent, pour le meilleur de son histoire, est aujourd’hui en régime de basses eaux, et alors émergent des pays, des communautés réelles ou supposées, s’autorisant du sentiment confus de leur identité pour faire servir leurs passions à n’importe quel usage de conquête, de pouvoir ou d’intérêt, alors qu’il n’y a de saine identité, nous ont appris les Lumières, que celle qui se forge et se renouvelle dans le dépassement vers les autres.

Forts de cette réserve de sens, de ces repères que nous a légués la Résistance, il nous appartient de restituer au passé toutes les virtualités qui n’ont pas abouti. L’existence du programme du Conseil National de la Résistance, les principes qui l’ont inspiré, les circonstances exceptionnelles qui ont présidé à son élaboration font que dorénavant les évènements ultérieurs sont jugés à l’aune de ce qui fut proclamé alors.

Sachant le danger qui avait pesé pour la survie de la France, le général de Gaulle s’en inquiétait pour l’avenir : « La victoire de la Résistance, disait-il, n’a de valeur que si elle rassemble la France au lendemain de la victoire. […] Cette flamme d’ambition nationale ranimée sous la cendre au souffle de la tempête, comment la maintenir ardente [plus tard] quand le vent sera tombé ? » s’interrogeait-il. C’est en reconnaissant notre dette à l’égard de la Résistance, en restant fidèle à ses idéaux et à ses valeurs, que nous pourrons, en partie, nous en acquitter. C’est faire œuvre de gratitude pour ce qui a été accompli. Mais pas seulement :  la Résistance nous instruit pour relever les défis actuels. Du chaos de l’été 1940 à « la promesse de l’aube » du printemps 1943, il a été prouvé, comme l’a dit l’écrivain Georges Bernanos, que « La plus haute forme d’espérance, c’est le désespoir surmonté ». C’est une leçon pour nous, aujourd’hui, en ces temps difficiles.

Antoine Poletti

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